Jérémy

Parti là-bas, voir si j’y suis.

Mar 24, 2013 - 7 minute read

2 semaines !

Je viens de passer deux semaines à Singapour. Après ma dizaine de jours dans les montagnes népalaises, et même si je connais déjà ce pays - cette ville, je me sens un peu perdu. Ça grouille dans tous les sens. Ici, je suis à nouveau un anonyme. Les commerçants se foutent pas mal de votre tronche. Ce qui peut avoir un côté reposant. Mais le concept de proportionnalité prend ici tout son sens. J'écrirai certainement sur le sujet plus tard, mais j’attends d’avoir davantage ressenti ces sentiments avant d’en parler.

Bref, je loge dans une auberge de jeunesse, dans un dortoir de 12 personnes, souvent plein. Il porte le numéro 7 et ce n’est pas le dernier. Je pense qu’il y a ici quelques 100 personnes quand le plein est fait. Ça va, ça vient. On parle toutes les langues dans tous les coins. Les rencontres se font en anglais. Je reconnais très vite mes compatriotes, et eux aussi me flairent français très vite. Beaucoup de small talk, mais pas de vraie rencontre dans cette antre du sac à dos.

Logique… Je suis présent le matin pour le petit déjeuner. La journée, je file à l’espace de coworking pour aller bosser. Une fois la journée de travail terminée, je commence ma soirée touristique. J’arpente les rues de l'état, en long, en large, en travers. Je n’irai pas jusqu'à dire que je connais la ville comme ma poche, mais presque. Et du coup, je rentre très tard, en même temps que les insomniaques pour retrouver mon lit métallique qui grince et mes acolytes de ronfleurs ! Le week-end ou quand j’ai un moment de libre, je file visiter un musée ou voir une expo.

Ce qui me fait penser, que les 4 derniers jours où j'étais là-bas, un japonais est arrivé. Et à lui tout seul, je crois qu’il a réussi à épuiser tout le monde. J’ai croisé dans ma vie quelques experts du ronflement. Mais alors lui, il bat tous les records. L’impression qu’il va mourir à chaque inspiration. Il sort de ses apnées comme s’il venait de se noyer dans un rêve. Ça le réveille aussi, comme quoi il y a une justice dans ce bas monde.

Le week-end du milieu de mon passage, j’ai un copain - Steve - qui est escale à Singapour. Ça fait du bien de retrouver un pote à l’autre bout du monde ne serait-ce que pour deux jours. Aller flâner dans les bars et les restos. Il m’emmènera dans un bar dont j’ai bien sûr oublié le nom, mais qui se trouve à 258m au-dessus du sol pour siroter une bière tout en regardant le coucher de soleil.

Une nuit, parmi tant d’autres, j’ai un peu de mal à trouver le sommeil. Et je descends dans le lobby (salle commune), pour bidouiller des trucs, écrire dans mon journal de bord (et oui celui-là n’est pas publié ici, j’ai mes p’tits secrets) et un mail. Bref, une nana est dehors, et elle semble faire un FaceTime avec une copine. Elle montre l’intérieur de l’auberge avec son iPhone à son interlocutrice. Etant dans le champ, je me permets de faire un coucou de la main pour ne pas être impoli. Bon OK, la nana tenant l’iPhone dans sa main était plutôt très mignonne ! Je continue mes trucs. Puis je finis par sortir fumer une clope. Elle est toujours en visio-conférence (très moche comme terme, j’adore). Loin de moi l’idée de vouloir épier les conversations, mais elle parle en français. Vous savez celui qui nous vient du grand froid québécois. Et oui, celui qui fait que d’un coup le mojo de la poulette s’estompe un chouia. Et dans les bribes de mots que je comprends, j’entends "… moi je lui donne un 6 ou un 7". Comme on est une bonne dizaine dans les parages, je me doute bien qu’elle parle de quelqu’un de tout proche. Puis, elle dit "… non, je crois pas qu’il comprenne le français…".

Puis d’un coup, mauvais pressentiment, putain j’espère qu’elle ne parle pas de moi ! Je le saurais très vite, quand elle se tourne vers moi et me dit "Tu comprends le français ?".

Réponse avec un léger accent forcé : "Oui, oui, je suis français !". Réaction immédiate de sa part, elle éclate de rire, devient rouge comme une tomate et se cache la tête dans ses genoux. Et dit à sa copine, "Oh putain il est français !".

On en rigolera un peu plus tard, mais je n’oserai pas demander si c'était sur 10 ou sur 20. Des fois, il vaut mieux ne pas savoir…

Entre autres rencontres rapides, quelques secondes, soirée ou journée partagée, j’ai surtout fait la connaissance d’un couple à l’espace de coworking. Lui est français, elle japonaise. Ils vivent à Singapour depuis quelques mois. Ce sont les spécialistes de la cuisine à Singapour, ils disposent d’une Bible référençant les meilleurs restos au meilleur prix. Chaque midi est un vrai délice. On ira, on est pas français pour rien, au bar "The Wine Company" siffler 5 bouteilles de blanc avant de terminer sur la plage rejoindre d’autres expats et locaux qui eux aussi se font une soirée pinard, bière, fromage. Ça cognait sévère le lendemain matin.

Ce même matin, je file direction le Starbucks le plus proche (oui bah quand t’es dans un pays lointain, tu vas au Starbucks des fois) pour avoir un vrai café. Sur la route, un Sikh m’arrête. Me dit que je suis quelqu’un de très chanceux, que les 2 dernières années n'étaient pas terribles. Mais les deux suivantes vont être extraordinaires ! Il me pose des questions dont il écrit les réponses sur un papier avant que je n’ouvre la bouche… Il m’explique qui je suis, mon caractère, etc. Il me dit de faire attention aux gens qui essaieraient de profiter de ma générosité. Il m’assure que deux très belles femmes m’aiment, oui deux ! Bref, je suis naïf et plus léger de $10. L’enc*lé, il m’a bien eu. Un peu vexé, je jette le porte bonheur qu’il m’a donné. Je m’en fous, même si ça attire le mauvais œil, je suis plus balèze que lui.

Alors avec tout ça, quel est le verdict ? Clairement, ces quinze jours n’ont pas été le plaisir que j’ai pu éprouvé à être en Inde ou au Népal. A cela il y a trois raisons principales :

  1. J’y étais vraiment en mode travail presque tous les jours. Cela fait de moi un local dans un environnement dans lequel j’ai très peu de connaissances, donc oui, des fois le temps paraît long. Mais cela ne me gène pas plus que ça, car c’est le choix que j’ai fais en partant, je savais que ça arriverait, donc pas de souci.

  2. Qui est une conséquence du point un, peu de belles rencontres. A part, bien évidemment Ben et Kyoko (le couple de l’espace de coworking). Donc il y a des moments de solitudes, mais ça s’apprivoise et en plus il est assez simple de le rompre, il suffit juste de le décider et d’agir. Et surtout, les belles rencontres, comme en ce moment même à Bali, ça ne se commande pas. Rencontrer des gens c’est facile. Rencontrer des personnes avec qui le courant passe tout de suite et partager quelques jours de vie communes, de rires, de "j’te raconte ma vie", ça ne se commande pas.

  3. Partir un an implique de s’attendre à avoir des mauvaises nouvelles dans son entourage proche, pour lesquelles la distance est un réel handicap. Sentiment d’impuissance…

Après moult hésitations, je me décide enfin à quitter Singapour pour aller à Bali.

J’y suis. Il y a bien plus de choses intéressantes à en dire. Mais c’est pour une autre fois, car c’est toujours en cours !

NB : le titre de ce billet est débile, mais fait référence à un film que j’ai adoré étant jeune. Je trouve que l’intonation que prend l’acteur pour dire "2 semaines" dans le film résume assez bien mon sentiment pour ce bref passage.